Oh les beaux jours – thêatre de l’Atelier

 Oh les Beaux jours – de Samuel Becket avec Catherine Frot

Le rideau se baisse a la fin du deuxième acte. Silence dans la salle. Les spectateurs attendent la suite avec gourmandise. Le rideau se relève. Catherine Frot entre en scène avec un petit sourire gêné et elle dit, presqu’en s’excusant : « c’est fini ». Alors la salle se met a applaudir avec enthousiasme.
Un petit moment de grâce. Elle sourit encore, elle a l’air vraiment contente d’être là. Elle ramasse des confettis qui jonchent le sol et les envoient en l’air. Un dernier petit geste de la main et les répliques de la pièce commencent à revenir en boucle dans nos têtes comme des rengaines.
« Et maintenant. »
« Encore une journée merveilleuse. »
« Ne pas se plaindre. »
« Pas de souffrance. »
« Oh le vieux style ! »
L’histoire. Une femme s’enfonce dans le sol et le temps passe, stérile, sans début ni fin, autres que ce réveil qui sonne le matin et qui sonne encore pour l’heure du coucher le soir.
On pourrait craindre la déprime, mais c’est drôle, piquant, émouvant, poétique, étrangement vivant. L’absurdité de l’existence façon Beckett prend des airs de jubilation. Elle parle, elle s’agite, elle ouvre son ombrelle, elle cherche des objets dans son sac qui vont lui permettre de « tirer sa journée » et alors, la seule crainte, la seule terreur devient la solitude. L’enfermement progressif, l’enterrement de son vivant, tout cela est supportable, merveilleux même, tant qu’une oreille attentive, ou même distraite, est là pour entendre. Ne pas parler dans le désert, voilà tout ce qu’elle demande. Et trouver le bon moment dans la journée pour chanter, pas trop tôt mais pas trop tard non plus, ne pas laisser passer sa chance.
Willy, son amour, son compagnon, voudrait, lui, disparaître. Alors qu’elle s’enfonce dans la terre, il se réfugie volontairement dans un trou, puis s’arrache dans un ultime effort pour attraper ce pistolet, le seul objet du sac qui ne sert pas à passer le temps, mais à l’arrêter.
Avec sa petite voix haut perchée, l’expression de son visage comme seul jeu de scène, sa façon de prononcer les phrases saccadées, interrompues, répétitives du texte, comme si elle les inventait, son agitation frénétique qui la fait ressembler à un oiseau sur une branche, Catherine Frot est formidable. Elle nous entraîne dans la nostalgie, la fatalité, la tristesse et le désir de vivre.

J’ai adoré la pièce, tout comme « C lui  » , à qui je dois cette critique . Malheureusement, la dernière représentation étant ce soir, il vous faudra patienter avant de pouvoir vous même y assister .

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1 comment

  1. 1

    Ce doit être une excellente pièce en effet ! J’ai déjà assisté à des représentations de Catherine Frot que j’ai appréciés.
    Merci pour ce partage.
    Très bel après-midi.
    Amitiés.

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