GRAND PALAIS – MONUMENTA 2010 Christian BOLTANSKI

Je suis en colère

il devait s’agir d’émotion, de recueillement, de devoir de mémoire, de vie, de mort ….

Pour moi, le devoir de mémoire est capital,  transmettre à nos enfants pour ésperer éviter que les horreurs du passé ne se reproduisent , indispensable, et c’est la raison pour laquelle je ne peux rester neutre devant cette exposition, qui revendique les mêmes valeurs. Je sais que la Shoah est un thème difficile à aborder de front, et je comprends que les artistes qui souhaitent l’évoquer utilisent métaphores et chemins de traverse, mais dans ce cas précis …

nous sommes arrivés avec la certitude d’être pris aux tripes, transportés par l’émotion, et en guise d’émotion, nous avons trouvé ça … Du grand  » Shoah business « , celui là même que Boltanski rejète haut et fort .

En quoi consiste cette  » oeuvre  » :

à l’entrée, un mur de casiers numérotés, tel qu’on en trouve dans certains bureaux de poste

Une fois ce mur dépassé, on découvre la nef, investie par l’artiste…

des amas de vêtements multicolores, certains disposés précautionneusement au sol, et d’autres entassés pour former une pyramide géante qui donne plutôt envie de se jeter dedans et qui rappelle étonnemment les piscines remplies de balles multicolores que l’on trouve chez Ikea ; le tout forme une composition assez esthétique il est vrai, qui donne plutôt envie de prendre des photos que de se recueillir sur les victimes de l’histoire contemporaine, ou même de réfléchir à la mort, la vie, et la finalité de l’une ou de l’autre …

un vacarme assourdissant, qui, loin de faire penser aux fragiles battements d’un ou de plusieurs coeurs, envahit la tête et paralyse l’esprit.

Alors, me direz vous, une exposition , ou encore une oeuvre, puisque c’est ce dont il s’agit, qui n’atteint pas tout à fait, ou encore pas du tout son objectif et ne transmet pas le messge qu’elle est censée véhiculer, c’est un phénomène assez fréquent . Certes .

Mais, dans le cas présent, au dela de mon ressenti, c’est ce que j’ai entendu ou vu qui m’a inquietée :

c’est d’abord cette étudiante, disant doctement à l’amie qui l’accompagne :  » ça fait penser à un camp de concentration « 

et puis un des nombreux médiateurs présents qui explique que Boltanski  » se défend d’exploiter la Shoah à des fins marketing « 

et enfin, ces deux personnes, dont nous avons cru un instant qu’ils étaient des figurants faisant partie de l’oeuvre , tellement conditionnées par je ne sais quel discours obscur si souvent associé à l’art contemporain, qu’ils sont comme rentrés en transe

Alors si vous avez envie de voir un joli capharnaum coloré dans ce cadre somptueux du grand Palais, n’hésitez pas, mais si l’objet de votre visite est l’émotion, la volonté de comprendre l’humain et sa force dans des situations désespérées, votre place n’est pas là .

Allez plutôt voir, ou revoir  » La vie est belle «  , de Benigni : voilà un véritable chef d’oeuvre, qui parle de LA vie, de l’HUMAIN, et se tourne vers l’avenir avec une force digne des vraies oeuvres d’art .